Choux autrefois

Extrait du Dictionnaire GEOGRAPHIQUE, HISTORIQUE et STATISTIQUE des communes de la Franche-Comté
De A. ROUSSET
Tome II (1854)

Chonacum, Choix, Chol, Choz, village de l’arrondissement de Saint-Claude, canton, perception et bureau de poste des Bouchoux ;
succursale ; à 8 km des Bouchoux, 19 de Saint-Claude et 65 de Lons-le-Saunier.

Altitude : 850m.

Le territoire est limité au nord par Rogna et Vulvoz, au sud par Viry et les Bouchoux, à l’est par les Bouchoux et Vulvoz, à l’ouest par Vulvoz, Rogna et Viry.

Vers chez Pierre Blanc, chez les frères Blanc, sous la Charrière, sous la Boutière, sur la Créta , vers chez les Tacon, vers chez les Fiolet, aux Affertiers, vers chez Fournier, les Prés-Druet, le Rosset, vers chez Casery, vers chez Bel, vers chez Nabot, au Perchet et vers chez Fournier, sont des hameaux ou maisons isolées, qui font partie de la commune.

Il est traversé par les chemins vicinaux tirant à Viry, aux Bouchoux et par celui dit de la Charrière ; par les biefs de la Périne, de la Miène, de la Créta et le ruisseau de Longviry qui y ont leurs sources, enfin , par le bief de Préverant ou Rosay.
Le village est situé au fond d’une vallée resserrée entre deux hautes montagnes ; les maisons qui enforment le centre sont groupées, construites en pierre, couvertes en bardeaux et élevées d’un étage audessus du rez-de-chaussée.

Population :

En 1790, 469 habitants ; en 1846, 415 ; en 1851, 403, dont 209 hommes et 194 femmes ;
Population agglomérée 268 habitants ; population spécifique par km carré, 48 habitants ; 96 maisons,
savoir : à Choux, 61 ; au hameau du Rosset 7 ; sous Cuchet, au Pré-Créret et au Pré-Nardet, 5 ; aux Affertiers et aux Peloussiers 4 ; au hameau de Cernois, 4 ; au moulin de Préverin , 1 ; 135 ménages.
État civil : les plus anciens registres de l’état civil remontent à 1638.
Vocable : Saint-Laurent.
Série communale à la mairie depuis 1793, déposée aux Archives Départementales avant, où Choux a reçu les cotes 14 J 86 à 88, 5 E 542/6 à /8. La série du Greffe a reçu les cotes 3 E 246 à 248, 3 E 2708 à 2714, 3 E 7888 et 7889, 3 E 9985 à 9987 et 3 E 11420. Tables décennales : 3 E 1122 à 1130.
Microfilmé sous les cotes 5 Mi 284 à 286, 2 Mi 377, 2 Mi 399, 5 Mi 1216, 2 Mi 940, 2 Mi 1709, 5 Mi 1 et 5 Mi 1183.

Cadastre :

Exécuté en 1828 : surface territoriale 829h 25a, divisés en 3092 parcelles que possèdent 142 propriétaires, dont 29 forains ; surface imposable 819h 33a, savoir : 264h 22a en bois, 237h 29a en pâtures, 193h 45a en terres labourables, 99h 18a en prés, 12h 97a en friches, 7h 47a en broussailles, 2h 34a en sol et aisances des maisons, 2h 29a en murgers et rochers, 9a en jardins, d’un revenu cadastral de 5.521 fr. ; contributions directes en principal 1.919 fr.

Le sol, de fertilité moyenne, produit du blé, de l’orge, de l’avoine, des pommes de terre, peu de légumes secs, de lin et de maïs, du chanvre, des fruits et surtout des noix, du foin et des fourrages artificiels. Le revenu réel des propriétés est de 5 pour cent. On importe moitié des céréales et le vin. On élève dans la commune des bêtes à cornes, des chèvres, des moutons et des volailles. 25 ruches d’abeilles.
On y fabrique 9.000 kg de fromage, façon Gruyère, et 2.000 kg façon Septmoncel.
On trouve sur le territoire des sablières abondantes et de première qualité, des carrières de bonne pierre à bâtir, de taille et à chaux.
Les habitants fréquentent habituellement les marchés de Saint-Claude, Oyonnax (Ain) et Dortan. Trois foires par an, pour la vente du bétail, seraient très utiles. Les patentables sont : 5 aubergistes, 1 maçon, 1 marchand de fromage en gros, 2 exploitants de scierie mécanique pour bois de construction, 2 exploitants de moulins à farine à une paire de meules, 1 menuisier et un marchand de bois de sciage en gros.
Une soixantaine d’habitants émigrent chaque année à l’automne pendant trois mois, pour aller peigner le chanvre dans les départements du Doubs et du Haut-Rhin. Ils rapportent chacun un bénéfice net d’environ 100 fr. A leur retour, ils travaillent sur le tour et fabriquent de la tabletterie, tout en s’occupant de la
culture de leurs propriétés.
Biens communaux : une église, un cimetière à l’entour, une maison commune construite en 1812, renfermant la fromagerie, la mairie, le logement de l’instituteur, la salle d’étude, fréquentée en hiver par 60 garçons et 25 filles ; 2 fontaines avec abreuvoirs et une avec lavoir ; enfin 381h 48a de bois, broussailles et pâtures, d’un revenu cadastral de 1.190 fr. Bois communaux : 280h 48a de bois-sapins et taillis, dont 200 stères sont délivrés annuellement.
Budget : recettes ordinaires 3.4l9 fr. ; dépenses ordinaires 3.479 fr.

NOTICE HISTORIQUE

L’autorité des historiens qui ont écrit que la terre de Saint-Claude n’était qu’un vaste désert à l’époque où Saint Romain vint fonder l’abbaye de Condat, est tellement grave, que nous osions à peine émettre une opinion contraire. En face cependant des preuves qui s’accumulent, à mesure que nous avançons dans nos recherches, il n’est plus permis de douter du séjour du peuple-roi dans cette contrée. Sans parler de la ville d’Antre, de Jeurre, de Molinges, de Chassal et d’Etables, portons-nous à l’extrémité du territoire, du côté du Bugey, les découvertes y seront aussi importantes qu’en deçà de la ville de Saint-Claude. On a trouvé à Choux, en 1837, au pied du mont des Ecolais, des médailles d’Auguste, de Vespasien (Judea capta) deTrajan, d’Antonin-le-Pieux, des deux Faustines, de Dioclétien, de Maximien, etc., qui ont été recueillies par M. le chanoine Caillat. Une grande voie, tirant du pays des Allobroges à la ville d’Antre, passait par la Combe de Désertin, et de là se divisait en deux branches se dirigeant, l’une sur Choux et l’autre sur Viry. La montagne des Ecolais dominait ce chemin à l’occident, et à l’est se trouvait un autre rocher à base arrondie, appelé en Beauregard. Nous avons eu souvent déjà à signaler celte dénomination comme un souvenir du culte druidique. Un autre embranchement de cette route se nommait la Vie-des-Maures, indice probable du passage des Sarrasins. Ne pourrait-on pas admettre qu’une muraille fut élevée pour résister à cette invasion, dans l’endroit dit à la Combe-Mura ou Murée ? Une autre preuve d’antiquité se tire des chartes mêmes de l’abbaye de Saint-Oyan. Un diplôme de Lothaire Ier, de l’an 855, confirme à ce monastère la possession de Viry, Viregium. Si Choux n’est point nommé dans cet acte, c’est qu’il faisait primitivement partie de cette paroisse. Le diplôme de l’empereur Frédéric Barberousse, de l’an 1185, dans le recensement des possessions du même monastère, y comprend l’église de Choux, ecclesiam de Chonaco. Ce qui prouve que Chonacum est bien le nom latin de Choux, c’est que dans ce titre, les autres églises, dont le nom suit immédiatement, sont très rapprochées de ce village. On prétend que Jean de la Hu se qualifiait déjà de curé de Choux en 1160. Nous ne connaissons pas ce document, mais le fait est très possible.

Seigneurie :

Choux dépendait du Bâtis de la terre de Saint-Claude, dit de la Grande-Cellererie, dont l’abbé de Saint-Oyan était seigneur en toute justice, haute, moyenne et basse. Les habitants étaient mainmortables et payaient les lods, à raison du quart du prix des ventes. La communauté avait ses biens propres, administrés par deux échevins et des conseillers. La Combe de Désertin, qui en faisait partie, était un ancien alleu. Ceux qui l’habitaient ne cessèrent d’être francs. Prévôté : Une famille noble, branche cadette de celle de Viry, qui elle-même descendait des seigneurs d’Arbent, tenait cette prévôté en titre d’office. Bernard de Viry, dit de Chol ou de Cholet, vivait en 1266. On la retrouve au XVe siècle établie à Poligny. Jean Chol y vivait en 1403. Jean et Pierre Chol, en 1460. Ces derniers étaient les neveux de Jean Chevrot, évêque de Tournay. Plusieurs de leurs descendants ont occupé des emplois distingués, ainsi qu’on peut le voir dans le tome 2 des Mémoires historiques sur Poligny, par Chevalier.

Évènements divers :

Les habitants de Choux avaient reçu, à une époque très reculée, des abbés de Saint-Claude, la propriété de leurs communaux, et l’usage dans la forêt de Beauregard et de Bois-de-Ban. L’administration des échevins fut si déplorable, que les terrains furent vendus à vil prix au commencement du XVIe siècle et les bois défrichés. Leurs maisons tombaient en ruine et dans l’impuissance de les rétablir, ils fuyaient le sol natal. En juillet 1587, l’abbé Joachim de Rye leur permit de couper du bois dans la forêt des Ecolais, pour leur usage, la reconstruction et l’entretien de leurs maisons, avec défense d’en vendre, sous peine d’une amende de 60 sols. Le prieur et les habitants des Bouchoux prétendirent que la montagne des Ecolais était comprise dans leur territoire. Pour empêcher leurs voisins de jouir des effets de la donation de Joachim de Rye, ils se portèrent en foule dans la forêt, y coupèrent plus de 1000 pieds des plus beaux arbres et maltraitèrent ceux qui voulaient résister à leurs violences. De tout temps, l’incertitude des limites fut pour ce village la cause d’une série de calamités. Il fallait résister aux usurpations commises par les habitants des Bouchoux, de Viry, du Bugey et par les Suisses. Des luttes à main armée s’engageaient chaque jour. De simples querelles entre bergers dégénéraient en
combats sanglants entre les populations entières. Dans toutes les guerres que le comté de Bourgogne eut à soutenir contre la France, les pays frontières furent naturellement les plus maltraites. Chacune d’elles fut marquée à Choux par le pillage et l’incendie.
Malatière :

Un hospice pour les lépreux était établi dans ce village, au lieu dit à la Malatière. Cet établissement est mentionné dans un titre de l’an 1270. On le donne pour confin à une terre qui appartenait au prieur des Bouchoux. Lors de la peste de 1630 et de 1636, des loges furent établies pour les malades dans la contrée dite aux Cabornes.

Église :

L’église de Choux, dédiée à saint Laurent, dont on célèbre la fête le 10 août, est située sur une montagne, au sud-est du village. Quoique dépourvue de style architectonique, elle paraît remonter au XVIe siècle. Elle se compose d’un clocher couronné par un dôme disgracieux, d’une tribune, d’une nef terminée par le sanctuaire et un choeur semi-circulaire, de deux chapelles à voûtes d’arêtes et d’une sacristie.

Biographie :

Les noms de Mermet, Michalet, Caillat, Jacquenod, sont très anciens dans le pays et sont encore portés aujourd’hui par des ecclésiastiques, des médecins, des fonctionnaires publics et des professeurs de l’université.

Bibliographie : Archives de la préfecture du Jura.